Bonjour à tous, je suis Ghita, étudiante à l’ENS. C’est durant mes stages en startups et en VC que j’ai eu envie de créer First-time Founders, un média qui décrypte les dernières tendances dans la tech, le monde du VC et l’entrepreneuriat.
Bonjour à tous !
Je suis Ghita et bienvenue dans la 8ème édition de la newsletter First-time Founders, le média qui démocratise l’entrepreneuriat et la tech.
Deux fois par mois, je propose à mes lecteurs une immersion au sein de l’écosystème tech et entrepreneurial avec des analyses sectorielles, des focus métiers, des réflexions autour de l’entrepreneuriat et bien plus encore.
Let’s go!
Au sommaire cette semaine :
🎤L’épisode 16 de First-time Founders avec Joseph Choueifaty, le cofondateur et CEO de Goodvest, un nouvel acteur de l’épargne qui s’est spécialisé dans les projets responsables et durables.
🌳Les fintechs au service de la finance responsable
Qu’est-ce qui se cache derrière ce concept fourre-tout de “finance responsable” ?
Pourquoi les millennials sont une cible de choix pour les produits d’investissement responsable ?
Qui sont les acteurs qui participent à cette révolution green de la finance ? (+mapping exclusif des fintech françaises de la finance responsable)
Et quels défis doivent-ils relever ?
First-time Founders : Le podcast est de retour
Pour le premier épisode de l'année, j'ai l'honneur d'accueillir Joseph Choueifaty, le CEO et cofondateur de Goodvest.
Goodvest est un robo-advisor spécialisé dans l’épargne responsable.
Dans cet épisode, nous allons parler :
🏨Du parcours original de Joseph, de l'école hôtelière de Lausanne à Goodvest en passant par X-Hec Entrepreneurs.
💰De la genèse de Goodvest, de son avancement et de sa vision.
💸De levée de fonds et de ses attentes vis-à-vis de ses investisseurs.
🍃De finance responsable et de thématiques d'impact.
🔑Des difficultés qu'il a pu connaitre, du départ de sa cofondatrice et des clés d'une bonne association.
Les fintech au service de la finance responsable
Aujourd’hui incontournable, l’investissement responsable ne pesait que quelques dizaines de millions d’euros il y a 15 ans.
De nombreuses études démontrent l’intérêt croissant des Français pour les enjeux de développement durable dans leur quotidien. Ainsi, d’après une étude Odoxa-Aviva réalisée en 2020, 81% des Français tiendrait compte d’un label de positivité pour choisir un produit d’épargne. Une autre étude menée en juin 2019 par Audirep auprès d’un échantillon de 1028 personnes représentatif de la population française, montre que plus de 7 Français sur 10 pensent qu’il est important que les établissements financiers prennent en compte la transition énergétique et le développement durable. Ils sont aussi 4 sur 10 à trouver ce type de placement intéressant, cet intérêt étant plus marqué chez les moins de 35 ans.
Loin d’être une tendance passagère, la finance responsable gagne du terrain d’année en année. Mais alors, qu’est ce qui se cache derrière ce concept fourre-tout de “finance responsable” ? Pourquoi les millennials sont une cible de choix pour les produits d’investissement responsable ? Qui sont les acteurs qui participent à cette green revolution de la finance ? Et quels défis doivent-ils relever ?
Plongeons ensemble dans l’univers de la finance responsable.
Un concept novateur
La finance responsable ou l’investissement socialement responsable (ISR) désigne une forme de placement consistant à prendre systématiquement en compte des critères liés à l’environnement, au social et à la gouvernance (critères ESG), en sus des critères financiers. Nous évoquions les critères ESG dans la 6ᵉ édition de la newsletter sur l’investissement à impact. Pour rappel, ces critères sont utilisés pour évaluer la façon dont une entreprise affecte la planète, son impact sociétal et la façon dont elle est gérée.
Le critère environnemental tient par exemple compte des émissions de CO2, de la consommation d’électricité ou encore du recyclage des déchets.
Le critère social prend en compte la prévention des accidents, la formation du personnel, le respect du droit des employés, le dialogue social…
Le critère de gouvernance, quant à lui, vérifie la façon dont l’entreprise est dirigée, administrée et contrôlée (relation avec les actionnaires, la présence d’un comité de vérification des comptes…).
Pour résumer, nous pouvons dire que la finance responsable est une adaptation de la notion de développement durable aux enjeux de la finance.
De nombreuses sociétés de gestion proposent à leur clientèle un fonds ISR :
Les banques traditionnelles comme la Banque Postale ou BNP Paribas
Les banques éthiques comme la NEF
Les banques en ligne comme Boursorama
Les jeunes pousses, les fintech de la finance responsable que nous évoquons plus loin dans la newsletter.
Elles sélectionnent les entreprises y figurant en excluant d’abord les secteurs controversés tels que les combustibles fossiles, l’armement, etc puis les entreprises dont le siège social se situe dans un paradis fiscal. L’identification des sociétés éligibles repose ensuite sur la combinaison de deux analyses complémentaires :
L’analyse extra-financière : c’est là que les critères ESG rentrent en compte.
L’analyse financière : cette partie consiste à identifier et évaluer les entreprises les plus attractives d’un point de vue financier.
Certains labels garantissent et rendent plus visibles les produits d’investissement socialement responsables pour les épargnants en France et en Europe :
Label ISR : label français créé en 2016 par le ministère de l'Économie et des Finances, dont l'objectif est d'offrir une meilleure visibilité aux fonds d'investissement de droit français respectant les principes de l'investissement socialement responsable. Historiquement attribué à des fonds de type OPCVM (Sicav et FCP), il peut également être attribué depuis 2020 à des fonds immobiliers (SCPI et OPCI notamment), et plus généralement aux fonds alternatifs (FIA).
Label Greenfin : créé par le ministère de la transition écologique en 2015, le label Greenfin garantit la qualité verte des fonds d’investissement. Le label a la particularité d’exclure les fonds qui investissent dans des entreprises opérant dans le secteur nucléaire et les énergies fossiles.
Label Finansol : le label Finansol a été créé en 1997 pour distinguer les produits d’épargne solidaire des autres produits d’épargne auprès du grand public.
D’autres labels comme le label CIES ou encore le label ONU.
En matière de performance, une idée assez répandue chez les investisseurs est que la performance d’un investissement responsable est moins bonne que celle d’un placement plus classique du fait notamment de la réduction volontaire de l’univers d’investissement. Pourtant, des études ont démontré le contraire : en effet, il a été prouvé que la prise en compte des critères ESG apporte son lot de bénéfices et permet aux fonds responsables de résister aux fluctuations boursières.
Les millennials : une cible de choix
Cet intérêt croissant pour la finance responsable s’explique d’abord par une prise de conscience accrue du tarissement prochain des ressources naturelles et de la nécessité de réduire l’empreinte de l’activité humaine sur la nature. Les millennials, plus particulièrement, sont très sensibles aux enjeux de développement durable, de consommation responsable ou encore de circuits courts. Ils sont de plus en plus nombreux à vouloir donner plus de sens à leur épargne et à jouer un rôle plus responsable et plus actif dans l’économie sans pour autant renoncer à la performance financière.
En plus d’être très conscients des enjeux sociaux et environnementaux majeurs, les millennials sont de plus en plus nombreux à délaisser les banques traditionnelles. D’après une étude réalisée par Bain & Company en 2019, le taux d’attrition bancaire, qui correspond au nombre de clients perdus sur le nombre de clients total a fortement augmenté en 2019, notamment chez les jeunes clients de moins de 25 ans pour qui il a quasiment doublé, passant de 4,4% à 8,4%.
La légitimité des banques traditionnelles est rudement mise à l’épreuve et de nombreux reproches peuvent leur être faits :
Baisse du taux du livret A : Le 1er février 2020, le taux de rémunération du livret A est passé de 0,75% à 0,5%. Déjà à son plus bas niveau historique, ce taux descend encore, bien plus bas que l’inflation qui était à 1,1% en moyenne en 2019. En 2018, l’inflation devait se situer à environ 1,8% et le taux du livret A a été gelé à 0,75%, le rendement était donc inférieur de plus d’un point à l’inflation. Concrètement, cela s’est traduit par un manque à gagner de 50 euros (sur l'année 2018) pour les épargnants disposant de 5.000 euros sur leur livret. Le manque à gagner a atteint 100 euros pour un épargnant qui possède 10.000 euros d'épargne. À un niveau collectif, si on additionne les encours du livret A et du LDDS des particuliers, soit 360 milliards d'euros, le manque à gagner pour la collectivité des épargnants sur ce point de rendement en moins était de 3,6 milliards d'euros pour 2018, ce qui est considérable.
Le manque de transparence : D’après un sondage OpinionWay pour Robin’Finance, les Français sont 85% à estimer que les banques ne sont pas transparentes sur la manière dont elles utilisent notre argent. 8 Français sur 10 pensent que l’épargne sert à financer le fonctionnement des banques… Il y a donc urgence à clarifier l’usage fait de cet argent. D’autant plus que les 3/4 des Français aimeraient pouvoir choisir sa destination. Idéalement, ils aimeraient que leur argent serve à financer des projets locaux ou régionaux (74%), soutenir l’innovation en France (69%) ou encore développer des projets d’intérêt général (65%)
Des frais de placements financiers plus élevés : Les frais varient beaucoup d’un acteur à l’autre et selon le canal choisi. D’après une étude réalisée sur les tarifs de 16 banques à réseau, le coût peut varier de 0,3% à 0,75% pour un ordre du même acabit. Ce sont surtout les acteurs en ligne qui poussent les frais à la baisse. Saxo Banque propose par exemple des frais de 0,085% peu importe le niveau de l’ordre, soit 4,25 euros pour un ordre de 5000 euros. 72 % des millennials estiment que les gérants de portefeuille facturent des frais trop importants pour des produits qui parfois ne font que répliquer l’indice de référence.
Ainsi, on peut voir que l’offre bancaire des acteurs en place est très largement questionnée par les jeunes. Parallèlement, la conscience citoyenne sur les enjeux sociaux et écologiques progresse fortement. La finance devient un enjeu pour les pratiques de consommation des citoyens engagés.
C’est ce qu’ont très bien compris les nouvelles fintech dédiées à la finance verte.
La finance responsable : un formidable marché pour les startups
En alliant le numérique au développement durable et en palliant les manquements des banques traditionnelles, elles ont su se réapproprier les codes des millennials et se faire une place dans le monde de la finance responsable. Après les néobanques comme Revolut ou N26, les banques traditionnelles doivent aujourd’hui faire face à de nouveaux concurrents décidés à faire de la banque éthique la règle et non plus l’exception.
Plusieurs acteurs surfent sur ce créneau. Vous trouverez ci-dessous un mapping des principales startups française de la green fintech.
Plateformes de crowdfunding responsable :
Grâce aux plateformes de crowdfunding, on peut aujourd’hui très facilement financer des initiatives à impact social et environnemental. Il existe différentes manières de contribuer à un projet :
Dons avec ou sans contrepartie : C’est ce que proposent les plateformes de financement participatif historiques comme Ulule ou encore KissKissBankBank.
Prêt : Cette formule peut parfois être plus-rémunératrice que le livret A en atteignant des taux d’intérêt jusqu’à 6% ou 8%. Des plateformes comme Lumo ou encore Lendosphère proposent ce mode de financement.
Placement/Investissement
D’après le baromètre du crowdfunding 2019, réalisé par Financement Participatif France et Mazars, les plateformes de financement participatif en France ont collecté en 2019 un montant total de 629 millions d’euros, soit une croissance 56% par rapport à 2018.
Néobanques à impact :
Les néobanques à impact se multiplient et vont proposer à leurs clients un compte de paiement et une carte bancaire. De plus, et en fonction de la néobanque choisie, on peut avoir accès à une panoplie de services/partenariats green. Onlyone propose par exemple à ses clients de mesurer l’empreinte carbone de chacune de leurs dépenses. Ils s’engagent également à reverser 1€/mois de la cotisation de chaque client à un projet durable.
Plateformes d’épargne responsable :
Ces nouveaux robo-advisors joignent finance et éthique. Avec Goodvest, tous les fonds dans lesquels les clients investissent sont gérés par des sociétés de gestion sélectionnées en fonction de leur impact, de leur performance et des frais qu’ils exigent. Nalo, Epsor ou encore Mon Petit Placement proposent également des produits d’investissement spécifiquement dédidés à l’ISR (épargne salariale, assurance vie…).
Plateformes de calcul, de réduction et de compensation de l’empreinte carbone :
Grâce à l’open banking, un particulier peut connaître en temps réel son impact écologique. Greenly a lancé la toute première application mobile française qui mesure l’empreinte carbone de toutes nos dépenses. Chaque ligne de dépense est scannée directement sur le compte bancaire des utilisateurs. Elle est ensuite catégorisée en fonction de sa nature et des enseignes où ont été effectuées les achats. Enfin, les émissions sont calculées en appliquant au montant de la dépense un facteur d’émission monétaire qui varie par fournisseur ou secteur d’activité. Mais ce n’est pas tout, Greenly traduit par la suite en euros les kilos de CO2 non consommés et permet aux utilisateurs de les allouer au financement de la transition écologique. L’application propose également un accompagnement pédagogique pour permettre à l’utilisateur de découvrir les meilleures alternatives à ses achats.
Des initiatives similaires existent pour les entreprises. Carbo propose par exemple aux PME/startups un SaaS de calcul et de pilotage du bilan carbone. Paygreen leur permet même d’identifier des actions de réduction à mettre en place. Pour la compensation, Paygreen mise sur “l’Arrondi en ligne”, un arrondi solidaire qui permet de récupérer un capital qui sera ensuite partagé du marchand vers une association qu’il aura précédemment sélectionné.
Les défis que doivent relever ces nouveaux entrants
Le greenwashing
Les nouvelles fintechs qui voient le jour en France depuis quelques années sont sujettes à de très nombreuses critiques. Certains leurs reprochent d’entretenir la confusion sur leur activité et les accusent de greenwashing.
Le principal argument des détracteurs des néobanques à impact est qu’il est impossible aujourd’hui de connaître l’usage exact qui est fait des dépôts de leurs clients. Ces nouveaux entrants ne disposent pas d’agrément bancaire et sont donc complétement dépendants de leurs partenaires (Treezor pour Onlyone, Solaris Bank pour Helios). Les dépôts se trouvent alors séparés des comptes de ces néobanques, qui ne placent pas elles-mêmes l’argent. Difficile dans ces cas-là de savoir où il sera véritablement investi.
Onlyone se défend de telles accusations. Ils ne promettent à aucun moment d’investir les dépôts de leurs clients dans la transition écologique. Toutefois, ils sont en mesure d’assurer que cet argent n’ira jamais financer des industries carbonnées. Les dépôts sont cantonnées et n’intègrent pas le bilan de leur partenaire (en l’occurrence Treezor racheté en 2018 par Société Générale). Leur impact réside en outre dans le fait de permettre à leurs clients d’être acteurs de la transition, notamment à travers le logiciel de calcul des émissions carbone.
La finance responsable : un concept difficile à appréhender
Une étude menée en juin 2019 par Audirep montre que les produits financiers responsables restent largement méconnus. Un répondant sur deux voudrait en savoir plus sur ces produits, sur leur fonctionnements, leurs avantages et leurs inconvénients par rapport aux placements classiques.
Les notions qui structurent la finance responsable telle que la “gouvernance” ou “l’analyse extra-financière” par exemple ne sont pas toujours compréhensibles pour les épargnants et ne sont que très rarements définis.
Une meilleure information est le premier levier pour renforcer l’épargne responsable et encourager les Français à donner du sens à leur épargne.
Le manque de confiance des épargnants
Le flou entretenu autour des critères de sélection des fonds ISR et de labellisation dégrade la confiance des épargnants. Aujourd’hui, chaque société de gestion définit elle-même les critères qu’elle souhaite inclure dans sa grille d’analyse. Il n’y a pas de définition uniformisée de ce qui rentre ou ne rentre pas dans le jalon de la finance responsable. Les épargnants n’ont pas confiance non plus en tous ces labels qui devraient les rassurer en apportant une caution extérieure.
Un effort de convergence réglementaire doit être entrepris au niveau européen sur les critères pris en compte pour donner plus de légitimité à ses fonds. Il y a aussi un effort à faire du côté des labels pour mieux se faire connaitre et gagner la confiance des épargnants.
Conclusion
Face à l’envergure de nos défis sociaux et écologiques, de jeunes entrepreneurs se sont emparés de cette tendance pour créer de nouveaux services financiers plus proches des besoins des consommateurs.
En répondant aux critiques faites au système bancaire déjà en place et en proposant de nouvelles alternatives plus responsables, ils provoquent davantage de couverture médiatique et éveillent l’intérêt des acteurs bien installés.
À la manière des fintechs qui les ont précédées, ces nouvelles entreprises seront les instigatrices de la transformation du secteur financier, une transformation plus verte
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À dans deux semaines !
Ghita
Je cite "Toutefois, ils sont en mesure d’assurer que cet argent n’ira jamais financer des industries carbonnées. Les dépôts sont cantonnées et n’intègrent pas le bilan de leur partenaire (en l’occurrence Treezor racheté en 2018 par Société Générale). " ce n'est effectivement pas dans le bilan de Treezor mais dans le bilan de la SG chez qui sont déposés les fonds ! Ils ne peuvent donc absolument pas assurer que cet argent ne financera jamais des industries carbonées : OUI c'est du greenwhasing !